Voilà 3 ans que je suis entrepreneure. Au sens juridique du terme. J’avais monté une autoentreprise en 2015, mais ça n’est pas tout à fait pareil puisqu’une SAS ajoute quelques considérations investissements / juridique / produit / design / fourniture / stagiaires / locaux / financement…

1er Aveu : Un bilan ultra positif !

La liste serait tellement longue pour expliquer ce bilan.

Néanmoins, un résumé serait simple : J’ai tellement appris.
Sur moi, sur les autres, sur le monde.

Par contre, on ne s’en rend vraiment compte qu’après plusieurs mois…

Conseil : Ne baissez jamais les bras dans les premiers mois, car c’est là où vous créez tout, c’est long certes et personne ne comprend tout à fait ce que vous faites. C’est compliqué mais ça en vaut vraiment la peine.

2ème aveu : je ne me savais pas capable d’être entrepreneure.

De sortir de ma bulle de confort à ce point et d’oser autant. Bon ok, j’étais obligée puisque je me lançais dans le développement d’un produit innovant, avec une formation de financière et un bagage dans le service. J’ai ainsi appris mille métiers, sans vraiment le vouloir. Ça me permet de savoir là où je suis forte, et là où je suis vraiment nulle.

Conseil : ne vous sous-estimez jamais car vous n’imaginez pas tout ce qu’on peut faire avec seulement un peu de courage, beaucoup d’insouciance et énormément d’énergie.

3ème aveu : je suis devenue entrepreneure avec une idée, de l’énergie ET la volonté de tout contrôler.

Une idée ne fait pas tout, l’important est aussi de persévérer dans cette idée. Le troisième ingrédient n’est pas vraiment la cerise sur le gâteau, mais plutôt le curry que vous n’auriez pas dû mettre dans votre bœuf bourguignon, vous voyez ?

Parce qu’à vouloir tout contrôler, on s’épuise. Quel fournisseur choisir ? Pourquoi déposer un brevet et où ? Comment faire un dossier de financement R&D ? Quel incubateur en développement produit ? Quels salons choisir pour promouvoir mon produit ? Pourquoi fabriquer en France ? Je voulais avoir toutes les réponses et pouvoir argumenter tous mes choix, jusqu’au plus minime.

Pour reprendre les mots d’Elodie Loisel, mon modèle d’entrepreneure en produit innovant, « c’est de la schizophrénie. » Oui, on ne peut pas travailler au court terme et au long terme en même temps. Pour développer un produit innovant, on s’appuie sur différentes expertises (études de marché, recherche de financement, valeur ajoutée, discours commercial, prototypages par milliers, protection juridique plus complexe et j’en passe) qui sont là pour faciliter la réflexion stratégique.

Conseil : n’essayez pas de tout maîtriser, ça prend vraiment trop de temps et d’énergie !

Rothshild a dit une phrase qui m’a marquée. « Il y a 3 façons de se ruiner : le jeu, les femmes et les ingénieurs. Les deux premiers sont bien plus agréables, mais le troisième reste quand même le plus sûr. »

Et en effet, comprendre les ingénieurs (au sens technique, non pas tous les ingénieurs métiers-commerciaux-autres) est une véritable gageure. Les notions de délais et de budget sont différentes. Il y a un vrai dictionnaire pour parler avec les ingénieurs. Quant aux avancées d’un prototype à l’autre, elles peuvent paraître bénignes ou incroyables, mais la stoïcité de vos interlocuteurs ne vous permet jamais vraiment de savoir à quelle phase du projet vous en êtes. C’est assez déroutant.

Conseil : si vous développez un produit matériel alors que vous n’êtes PAS ingénieur et n’avez pas ce fameux dictionnaire qui permet une communication sereine et claire avec la partie technique, lâchez prise et faites leur confiance ! Occupez vous de tout le reste (c’est déjà énorme).

4ème aveu : je suis sortie de chez moi, beaucoup.

Pour maximiser les chances, j’ai suivi toutes les formations d’entrepreneure, les incubateurs, les accélérateurs, les facilitateurs, je me suis inscrite à tous les réseaux d’entrepreneurs, j’ai écouté tous les conseils bons et moins bons, j’ai fait des partenariats avec d’autres entreprises pour exposer sur des salons, j’ai osé parler en public devant beaucoup beaucoup de monde (je suis une ancienne timide, j’ai oublié de vous dire), j’ai appris à me relever après des sacrés échecs, j’ai remis en cause ma méthodologie et mon organisation des centaines de fois et j’ai toujours mis un point d’honneur à faire une action extraordinaire inédite par semaine.

J’ai été à une conférence de David Laroche la semaine dernière sur la confiance en soi. Il expliquait que seulement 5% d’entre nous n’aurait aucun regret en fin de vie par rapport à ce qu’il a accompli. Et que pour avoir une vie exaltante, il fallait changer ses perceptions sur sa vie, comment analyser un problème de façon différente pour le dépasser. Souvent, ce qui nous bloque, ce n’est pas le problème mais la façon dont on le perçoit.

Conseil : Quand vous avez un problème, parlez-en à trois personnes différentes, qui n’ont pas du tout les mêmes profils. La façon dont vous allez leur exposer votre situation sera différente, et c’est souvent votre propre discours qui vous fera trouver la solution.

5ème aveu : avoir une vie exaltante n’est pas de tout repos.

Alors oui, je suis sortie de ma zone de confort, comme on dit. Avec un objectif de participer à trois événements par semaine, où je m’obligeais à parler en public et à distribuer au moins 5 cartes de visite. Fatiguant, mais par contre quelle fierté. Le fait d’accumuler les expériences, les lectures et les rencontres noient le négatif : lorsque je rencontre un ami, je ne lui parle que du meilleur livre et de la meilleure rencontre des dernières semaines. Mes proches ont tendance à penser que ma vie est formidable…

Conseil : être entrepreneure ne rend pas la vie formidable, mais change la façon de l’appréhender. Ne vous limitez pas au discours des personnes enthousiasmées que vous rencontrez, elles ont aussi leurs phases de moins bien. Elles ont simplement une plus grande envie de transmettre leur expérience que leurs doutes.

6ème aveu : J’ai une patience très limitée.

Et trois ans pour développer un produit, c’est mon maximum. Dans l’optique de tout contrôler, j’entends. Alors j’ai décidé de déléguer. Tout déléguer, les doutes, les inquiétudes, les plannings. L’objectif : me recentrer sur les domaines que je maîtrise à 100%. C’était la meilleure décision que j’aie jamais prise.

Parce que le produit ne s’est jamais aussi bien porté ! Je ne le contrôle plus, au sens policier du terme. Je le suis, comme une mère, qui a accepté de ne pas tout comprendre. Et le voilà qui prend forme. Pour la première fois, nous avons un prototype qui fonctionne à 100% sur 100% des tests avec 100% des ondes qui nous importent et qui respecte 100% des contraintes. Ironie du sort ?

Alexandre Gérard l’a dit : « Le but de l’entreprise c’est le bonheur de ses salariés. Et le bonheur des salariés, c’est qu’on leur foute la paix. » Je le savais, mais je ne l’appliquais pas.

C’est d’ailleurs un principe que Laure Jouteau, celle qui a créé les Aventurières, a mis en avant : notre tendance à promouvoir des conseils qu’on ne suit pas, sous prétexte que le cordonnier est toujours le plus mal chaussé. Arrêter de se donner des excuses et décider de se chausser correctement a été la meilleure chose que j’ai faite cet été ! Merci Laure. De tout cœur.

Conseil : faites confiance aux personnes avec qui vous travaillez. Soit elles sont dignes de confiance et vous ne serez pas déçu. Soit elles ne le sont pas, et vous le saurez bien assez tôt, sans avoir à vous surpasser pour les contrôler.

7ème aveu : J’ai (encore) pivoté.

Car, en parallèle, je me rends compte que les dossiers de financement et les études de marché ne servent pas qu’à écrire des business plan toutes les deux semaines. Avec trois ans d’expertise, je me suis formée à un sujet complexe : comment utiliser le numérique en entreprise, pourquoi la technologie peut impacter la créativité ou encore le syndrome de l’urgence que nos mails nous font ressentir. Toute cette connaissance devait soutenir le développement de produit. Mieux : je m’en sers à présent pour proposer de l’accompagnement, du conseil, de la conférence, des ateliers de réflexion sur comment mieux se servir des outils numériques en entreprise.

Ma prochaine conférence est déjà prévu jeudi 3 octobre prochain à Weréso Foch à Lyon.

Conseil : ne délaissez pas les études de marché et les dossiers de financement au prétexte que personne ne vous lira, car ils vous permettent de maitriser votre sujet et de devenir expert. Rien de tout ce qu’on fait en entrepreneuriat ne se perd. Et tel un tableau de Monnet, ce n’est qu’après beaucoup d’efforts qu’on voit le chef d’œuvre en prenant du recul.

8ème aveu : J’ai suivi un coaching.

Pour reprendre cet estime de moi que le développement d’un produit innovant peut émousser sur le long terme. J’ai appris ou réappris à quel point je savais me remotiver et me relever de circonstances complexes, que j’étais devenue à l’aise partout avec tout le monde, que j’avais une capacité de travail monumentale et que j’avais une vie vraiment pas banale.

Lors de ce coaching, j’ai fait un exercice simple. Il consiste à demander aux trois personnes les plus proches de moi (mon copain, mon frère, mon meilleur ami) quels sont mes trois principaux talents.

Ils m’ont dit : persévérance, sociabilité et curiosité. Chacun à leur manière.

Comme s’ils s’étaient donné le mot pour m’expliquer que, oui, je suis bien une entrepreneure. A ma manière. Avec une persévérance à ne jamais rien lâcher. Avec une sociabilité qui me permet d’aller vers les autres. Avec une curiosité jamais satisfaite pour toujours chercher.

Conseil : lorsque vous doutez, demandez à vos proches ce que vous faites le mieux. Ils sont les plus à même de vous motiver et de vous redonner confiance en vous.

Etre entrepreneure, ça ne s’apprend pas, ça se vit.

C’est sacrément dur, mais c’est tellement exaltant.

Marie-Anne Cloarec, Experte QVT 2.0